Adaptabilité professionnelle : s’imprégner de son environnement pour entrer en dynamique
Avec des métiers qui apparaissent, disparaissent ou se reconfigurent, l’adaptabilité professionnelle constitue un Graal pour de nombreuses entreprises. Qu’en est-il dans le secteur du management de transition ? Pour les professionnels qui y exercent, s’agit-il d’un prérequis ? Quels leviers ou compétences mobilisent-ils pour en faire preuve? Comment surmontent-ils les mécanismes naturels de résistance au changement ? Éléments de réflexion.
Sans adaptabilité professionnelle, point de manager de transition ?
S’il est un métier dans lequel cette compétence s’avère clé, c’est bien celui-là. En effet, chaque mission se déroule dans une culture d’entreprise différente de la précédente. Le manager est alors amené à collaborer avec de nouvelles personnes qui ont, toutes, leur personnalité et leur histoire propre. Pour un manager de transition, le changement est permanent ! Et c’est dans sa capacité à créer des relations privilégiées avec ses interlocuteurs – le donneur d’ordres en tout premier lieu – qu’il va générer la dynamique de la mission. Faire preuve d’adaptabilité professionnelle relève donc d’un impératif absolu.
Une fois ces premiers éléments posés, qu’entend-on exactement par la notion d’adaptabilité ? Dans le cadre du management de transition, il va s’agir d’effectuer des « sauts de puce » et de s’imprégner, très rapidement, du nouvel environnement dans lequel on évolue. Outre la culture et le profil du donneur d’ordres, le métier, le secteur, la taille de la structure, fluctuent. Les fonctions occupées par le manager de transition, au sein de l’entreprise qui le mandate, peuvent être extrêmement variées. Sa capacité à faire un reset de la mission précédente s’avère également décisive, pour aborder la nouvelle avec un regard neuf et sans a priori. Comme un grand sportif, son conditionnement émotionnel et mental doit lui permettre d’appréhender le nouveau match – ou la nouvelle balle – avec discernement et dans une grande stabilité émotionnelle.
Par ailleurs, l’adaptabilité professionnelle s’appuie sur un trait de personnalité chez celle ou celui qui en fait preuve. Mais cette aptitude initiale n’est pas figée : elle se développe grâce aux expériences que l’on vit – et via ce métier singulier. Le manager de transition représente l’archétype du professionnel en proie à l’incertitude permanente ! Lors de chaque mission, il repart à zéro. L’inconnu s’ouvre à lui… Certes, il bénéficie d’un décryptage au moment de l’initialisation de la mission, mais il va ensuite procéder à un « décodage social », durant les premières semaines de son intervention. Cela va lui permettre de révéler les écarts de perception – et les incohérences éventuelles – entre le donneur d’ordres, les équipes et les interfaces. Par sa posture extérieure et son analyse, il identifiera ainsi ce qui relève d’enjeux relationnels ou de pouvoir dans le système.
Quels sont les ingrédients de l’adaptabilité professionnelle ?
L’approche systémique en est l’une des principales composantes. Ainsi, un manager de transition ne va pas s’intéresser uniquement aux ressources humaines – s’il s’agit de son domaine d’expertise. Il va s’attacher à saisir ce qui se joue dans l’entreprise dans laquelle il intervient, à différents niveaux. C’est ce qui lui permet de s’imprégner de son environnement, pour entrer en dynamique avec les équipes. Ainsi, il fait preuve d’adaptabilité professionnelle, repartant d’une page blanche à chaque fois. L’intelligence relationnelle s’avère également clé. Elle permet à la fois de comprendre ses interlocuteurs et de détecter les atouts comme les risques. Les enjeux collectifs et individuels deviennent plus aisément identifiables. Dans cette perspective, l’écoute et l’empathie sont pleinement sollicitées. Ses capacités d’observation sont au premier plan. En parallèle, grâce à l’expérience acquise au fil des missions, le manager de transition dispose de repères sur lesquels il va capitaliser. Il comprend mieux les situations et relie très rapidement divers éléments entre eux.
Un bon manager de transition doit-il se muer en caméléon ?
S’adapter n’induit pas de se fondre dans l’organisation. L’immersion totale, voire l’osmose avec l’environnement, ne sont pas souhaitables. Il ne s’agit pas non plus de « rentrer dans le moule » – car la valeur ajoutée du manager de transition s’y dissiperait !
L’adaptabilité professionnelle consiste ici à se faire accepter par les équipes et l’ensemble des interlocuteurs de l’entreprise. La confiance qu’il construit, du fait de sa capacité à s’adapter par le respect de son nouvel environnement, lui permettra « d’intégrer » les projets ou d’identifier les problématiques de la structure, en tenant compte – notamment – de ses valeurs. Le manager doit pouvoir trier, maîtriser ses modes de pensée et ses réflexes automatiques. Ainsi, il évite de faire du copié-collé d’une mission à une autre.
Dans le même temps, le manager de transition conserve son regard extérieur. Il sait affirmer son point de vue, maintenir ses différences. Il se place régulièrement en méta-position pour agir, aider et soutenir l’organisation dans les transformations qu’elle doit opérer. Le manager n’est pas dedans, il est avec – aux côtés des équipes. Et il garde toujours bien en tête les objectifs de la mission. Si l’adaptabilité professionnelle est essentielle, elle nécessite de trouver un juste dosage pour garder son regard extérieur et garantir sa valeur ajoutée.
Comment échapper aux mécanismes de résistance au changement ?
Pour un manager de transition, faire preuve d’adaptabilité professionnelle, c’est avant tout être capable de « jongler » avec sa propre histoire, son expérience et ses propres valeurs. C’est aussi savoir gérer l’inconfort de l’incertitude. Toutefois, ce professionnel va être tenté de choisir la « facilité » à certains moments – comme tout-un-chacun. Sachant que les mécanismes de résistance au changement s’inscrivent dans ce champ.
Toute transformation bouscule en effet certaines habitudes ou repères, tout en réveillant des peurs fondamentales[1] : peur de l’abandon ou d’être ignoré ; peur de l’humiliation ; peur du rejet. Ces peurs font écho, respectivement, au besoin d’appartenir à un groupe, à celui de se sentir en maîtrise et compétent, ou au besoin de reconnaissance. Dans le cadre d’une mission de transition, le manager en charge du changement doit savoir identifier ce qui se joue chez les collaborateurs, tout en connaissant les différentes phases de résistance qu’ils vont traverser[2]. Son objectif est de les accompagner dans l’intégration de la transformation, notamment grâce à la communication et aux possibilités d’échanges qu’il provoque. Une partie des réponses à apporter aux problématiques de l’organisation doit venir des équipes. Mais que se passe-t-il quand le manager est lui-même en proie à ces mécanismes de résistance, malgré la multiplicité de repères dont il dispose et sa plus grande tolérance à l’incertitude ?
Dans ce type de situation, une extrême vigilance est requise de sa part. Il doit se garder de rester dans des standards. D’où l’importance du questionnement, qui doit l’animer en permanence ! Notamment via la remise en cause de ses propres méthodes : ne lui permettent-elles pas de répondre à ses propres peurs – alors qu’une autre façon de faire serait plus adaptée aux équipes ? L’un des antidotes à la résistance au changement tient dans la réflexivité dont le manager de transition peut faire preuve – pour éclairer ses propres réactions ou démarches.
L’adaptabilité professionnelle dépend beaucoup de l’environnement dans lequel on évolue. Dès lors, cette « compétence » – avec ou sans guillemets – doit être développée aussi tôt que possible, et en toute occasion ! Au niveau de l’entreprise, le management a la responsabilité d’accompagner les collaborateurs dans cette voie. Quant aux managers de transition, ils peuvent profiter du temps dont ils disposent dans l’organisation pour « ouvrir » les équipes à ce nouvel état d’esprit.
[1] Ces trois peurs fondamentales ont été mises en évidence par le psychologue des organisations Will Schutz. Pour en savoir plus, deux ouvrages à consulter : L’Élément humain de Will Schutz et Les 3 peurs et les 40 talents : l’approche de Will Schutz expliquée aux managers de François Cornu.
[2] Ces différentes phases sont : le refus du changement par principe ; la résistance ; la décompensation ; la résignation.
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