Axel Alletru, quand la résilience triomphe de la résignation
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« Un accident, un échec de vie, ne serait-ce pas la chance de votre vie ? » nous interroge Axel Alletru dans son livre les 28 principes pour rebondir. Lui a fait de son accident une opportunité de transformation de lui-même et des autres.
Vice-champion du monde de motocross en 2009, Axel Alletru chute le 27 juin 2010, à l’âge de 20 ans, pendant le Grand Prix de Lettonie. Éjecté de la moto, il perd l’usage de ses jambes. Personne ne sait s’il remarchera un jour. Très vite, il accepte son sort et se consacre à sa rééducation pour ne jamais avoir de regrets. Désormais, objectifs et échéances façonnent son quotidien. Sa première victoire arrive 18 mois plus tard lorsqu’il se met debout dans l’eau.
En tant qu’athlète de haut niveau, il utilise la technique de la visualisation. Il imagine les trajectoires à emprunter comme le font les skieurs avant leurs slaloms. Au-delà de la rééducation, il s’aide de son mental pour mieux progresser.
Il veut rester un athlète, mais avec son handicap. Il se lance donc le défi des jeux paralympiques de Rio 2016 en natation handisport. Il choisit la nage, car elle montre l’athlète avant le handicap. Il devient douze fois champion de France et décroche trois records dans sa catégorie.
Refusant de se résigner, il dépasse encore ses limites, revient aux sports mécaniques et accomplit son rêve d’enfant : participer au Paris Dakar. Avec ses 25 équipiers, dont François, son copilote, il réalise alors l’exploit inédit : la première personne handicapée au monde à gagner une catégorie sur le Dakar devant les concurrents valides.
Il remonte enfin sur une moto et court l’Enduropale du Touquet, sa région native. Ainsi, il « boucle la boucle des possibles ».
Aujourd’hui, il met son expérience de vie au service de tous par ses nombreuses interventions et conférences. Dans cette interview il nous partage quelques-uns des 28 principes pour rebondir, tirés de son livre éponyme.
La résilience : l’art de naviguer entre les torrents de la vie
En entreprise, les collaborateurs affrontent des turbulences économiques et des crises. Ils doivent sans cesse s’adapter et se réadapter, innover pour résoudre leurs problématiques. Ils doivent accepter de quitter le passé. Regretter « le temps d’avant » nous fige. Espérer que tout redeviendra comme avant est une utopie réductrice. La résilience, c’est notre capacité à surfer sur la vague du changement.
Pour ma part, j’ai la chance d’avoir des parents positifs et ce qui m’a fait tenir, c’est l’envie de remarcher, de redevenir le plus valide possible, de reprendre une vie la plus normale possible. Suivre ce leitmotiv m’a demandé beaucoup de travail et le soutien de mes proches a été primordial. En fait, j’ai connu deux phases : la reconstruction physique puis la reprise de la vie quotidienne.
Écouter les autres et soi-même
L’éducation (l’école, nos parents) nous conditionne. Elle nous transmet des croyances limitantes qui érigent des barrières et brisent mentalement notre objectif avant même d’envisager de le réaliser. Écouter les autres est indispensable, mais il nous appartient de trouver le juste milieu entre les conseils, l’expérience qui nous enrichit et les injonctions qui nous freinent.
Nos convictions, nos envies et nos rêves doivent primer et rester notre priorité absolue.
Revenir aux origines pour retrouver le sens
Quand vous rejoignez une entreprise, pourquoi le faites-vous ? La nouvelle génération notamment cherche des valeurs communes avec l’organisation pour laquelle elle décide de travailler. Dans les moments difficiles, revenir à la base, au pourquoi originel, au lien entre soi et l’entreprise choisie, permet de retrouver le sens de la vie, donc la motivation.
Quand je devais nager 12 km quotidiennement, me souvenir du sens de ma démarche, de ma volonté de remarcher un jour, m’a aidé à me recentrer sur mon objectif et à trouver la force nécessaire.
Nos fidèles lecteurs notent ici la notion de mythe originel, chère à Cahra.
La peur du changement nous pousse à l’inaction
Il est normal de vouloir rester dans sa zone de confort. Nous craignons pour nos acquis : notre vie quotidienne, notre emploi. Repartir de zéro nous effraie. Sortir ses tripes pour tout réapprendre n’est pas inné pour l’être humain.
Là encore, nous sommes aveuglés par des croyances limitantes. Ce que nous avons accompli une fois, nous sommes en capacité de le refaire autant de fois que nécessaire.
En France, la perception et le regard de l’autre, la peur de la différence sont autant de freins. Nous pensons que changer de style de vie, de statut social peut tout remettre en cause.
Le taux d’épargne, par exemple, témoigne de cette peur de l’avenir et du besoin d’assurance.
Les Anglo-Saxons, eux, ont une vision de l’échec totalement opposée. Changer de travail, perdre sa maison, déménager, tout cela fait partie intégrante de leur culture.
En réalité, face aux épreuves que la vie nous impose, nous n’avons pas le choix, alors nous trouvons la force de nous battre et de nous adapter.
Pour ma part, mon éducation et mes entraînements de sportif m’ont aidé, car on m’a appris que l’échec n’était pas une fatalité.
Accepter ne signifie pas se résigner
La différence entre accepter et se résigner est fondamentale.
Accepter, c’est faire preuve de résilience.
Se résigner, c’est stagner.
Accepter permet de partir au combat quand se résigner engendre le statu quo.
Nous avons le choix de vivre pour l’avenir ou de vivre dans le passé. Cette seconde solution nous empêche de croire en d’autres champs des possibles.
Un accident, un échec de la vie ne serait-il pas une chance ?
Et si nous considérions les accidents et les échecs comme des occasions de créer de nouvelles opportunités ? La vie nous offre de mauvaises et de bonnes surprises. À nous de savoir trouver le positif dans chaque épreuve. Pour ma part, sans cet accident, jamais je ne serais intervenu en conférences devant des milliers de personnes. M’enrichir des autres, véhiculer des messages de dépassement de soi et de résilience est une vraie chance pour moi. Partager la bonne parole aide les autres à se battre pour se réaliser. J’y vois une nouvelle mission de vie pour moi, que je prends comme une chance.
J’aurais pu choisir un prisme différent et rester enfermé à l’hôpital, assis dans mon fauteuil roulant. Je serais probablement tombé dans une quelconque addiction.
J’essaie d’aider les autres à travers mes témoignages, mes interviews et mes livres. Ma plus belle récompense est, sans conteste, d’entendre les retours de celles et ceux que mon discours a soutenus. Certains s’adaptent, d’autres vont au bout de leur rêve. D’autres encore cessent simplement de se plaindre pour des détails et c’est déjà beaucoup.
Je leur suis profondément reconnaissant de partager leurs ressentis et j’en éprouve beaucoup de gratitude.
Aujourd’hui, l’état d’Axel est stable, il marche avec ses béquilles et des attelles en carbone qui tiennent ses chevilles à 90 degrés. Sa plus belle victoire reste la rencontre avec sa femme et la naissance de ses deux enfants. Son prochain défi : le Paris Roubaix à vélo. Dans cette nouvelle aventure, il entraîne une centaine de partenaires pour transmettre ce message fort que « rien n’est impossible ». Vous pouvez rejoindre le challenge #JEPEUX2025 sur son site internet.
Merci infiniment, Axel Alletru, pour cette leçon de vie et d’humilité qui réveille l’espoir en chacun de nous.
Pour en savoir plus sur le parcours de vie d’Axel ALLETRU, visionner sa conférence TedX en vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=TCxuVZT8FPA