La connaissance de soi, un prérequis pour mieux manager ?
Connais-toi toi-même : cette formule de Socrate ne vous est sans doute pas étrangère. Dans des organisations où les interactions sont devenues constantes, une meilleure connaissance de soi « agit » sur les modes de management et l’efficacité professionnelle. Pour autant, constitue-t-elle le socle d’un management plus efficace et humain ? Les managers de transition [1] en sont-ils les premiers ambassadeurs ? Éléments de réponse.
La connaissance de soi dans l’entreprise : des avancées mesurées
À l’heure de la digitalisation, les organisations sont de plus en plus nombreuses à saisir l’apport de relations humaines de qualité à la performance. Avec un travail collaboratif qui se généralise, les collaborateurs doivent dépasser leur subjectivité pour comprendre la perception de l’autre. Une telle « ouverture » suppose une meilleure connaissance de leur propre perception, d’eux-mêmes et de leur environnement.
À ce stade toutefois, les organisations se contentent d’explorer quelques « points d’entrée » relevant de la connaissance de soi et du développement personnel. Ceux-ci étant, bien entendu, beaucoup plus larges que le « mieux communiquer » ! Dans la majorité des cas, la mise en œuvre d’un plan de formation visant le développement personnel des collaborateurs dans la durée n’est pas encore à l’ordre du jour.
Pourtant, l’impact positif du bien-être au travail sur l’efficacité professionnelle et la productivité est mis en lumière dans de nombreuses études. L’enjeu est de taille : le bien-être, allié à une meilleure compréhension de soi et de l’autre, génère une amélioration des relations professionnelles ainsi qu’une communication plus pertinente. Celles-ci permettent à leur tour une meilleure cohésion des équipes, laquelle aboutit à une augmentation de la performance.
Les apports d’une meilleure connaissance de soi en matière de management
Quelles sont les compétences clés d’un « bon manager » ? Le leadership, la bienveillance, la disponibilité, la capacité à fédérer ses équipes – entre autres. Quid de la connaissance de soi ?
Dans une perspective managériale, le fait de mieux se connaître équivaut à prendre conscience de la manière dont on accomplit sa mission, en identifiant ses forces et ses limites ainsi que ses valeurs personnelles. L’intelligence émotionnelle (identification de ses propres émotions et de celles des autres, interprétation des signaux envoyés [2], mise en œuvre d’une stratégie émotionnelle) nourrit également la connaissance de soi. Un manager ayant « travaillé » à cet égard pourra s’appuyer sur ses forces en cas de difficultés. Il s’assurera en parallèle que ses valeurs personnelles n’interfèrent pas dans la gestion de son équipe. Capable « d’ouvrir ses antennes », il repérera le mal-être d’un collaborateur ou un conflit naissant, en amont. Il affirmera son leadership tout en faisant preuve de bienveillance, encourageant et valorisant son entourage professionnel, et n’hésitera pas à se montrer directif si nécessaire ! Pourquoi ? Grâce à un alignement entre ce qu’il ressent, ce qu’il pense, ce qu’il exprime, ce qu’il met en œuvre et la façon dont il le fait. Une congruence rendue possible par une bonne connaissance de soi. À ce titre, celle-ci fait figure de socle de l’efficacité relationnelle – et de l’efficacité managériale.
En permettant de mieux se comprendre, de mieux comprendre l’autre et d’identifier ce qui se joue dans la relation, la connaissance de soi « libère » également des croyances limitantes, redoutables dans un contexte de transformation. Elle rend possible le « pas de côté » – prendre de la hauteur, élargir sa vision et donc trouver de nouvelles solutions.
Vous êtes manager et souhaitez apprendre à mieux vous connaître : comment faire ?
Pour s’engager sur le chemin de la connaissance de soi, il faut d’abord prendre conscience de ce besoin. L’envie d’y aller permet de déplacer des montagnes !
L’hypothèse la plus favorable est celle où l’entreprise dans laquelle on évolue « mise » sur la connaissance de soi. Elle propose des temps de prise de recul, mettant à la disposition des managers des séances de coaching par exemple. La connaissance de soi fait alors partie intégrante de l’activité professionnelle. Ainsi, chez CAHRA, l’intelligence émotionnelle, la prise de recul sur son propre mode de fonctionnement et sur ce qui se joue dans un système, irriguent la méthodologie dans son ensemble. Appréhendées lors de la formation des managers de transition, elles sont réinterrogées au fil des missions. Elles sont par ailleurs incarnées par le dirigeant-fondateur, Emmanuel Buée. Sachant qu’un travail de connaissance de soi offre des « bases solides », valables pour toute la vie.
Le cas échéant, chacun peut agir de son propre chef. La lecture d’un texte de référence tel que Managing oneself de Peter F. Drucker [3] permet de découvrir les 6 étapes clés de la connaissance de soi, dans une optique managériale. À savoir :
- L’identification de ses forces ;
- Celle de son mode de fonctionnement ;
- La détermination de ses valeurs ;
- La synthèse des résultats obtenus ;
- La formalisation de sa contribution à l’organisation ;
- La mise en œuvre de sa responsabilité relationnelle.
À moins d’être déjà « éveillé » au sujet, cette découverte théorique risque de ne pas suffire à faire évoluer ses propres pratiques.
Dès lors, existe-t-il des « outils » de connaissance de soi, accessibles et efficaces ? Bonne nouvelle : ils sont nombreux ! En revanche, il est important de trouver celui qui correspond à son profil. D’où l’intérêt de se faire accompagner. Un coach va en effet recourir à « son » outil de prédilection – parce qu’il le trouve plus efficace, ludique, etc. – tout en proposant une combinaison de méthodes pour répondre aux besoins spécifiques du manager qu’il épaule. Citons notamment :
- Le MBTI, basé sur la théorie des types psychologiques de Carl Jung, qui révèle les préférences de chaque profil en 4 dimensions (Extraversion/Introversion, Sensation/Intuition, Pensée/Sentiment, Jugement/Perception) ;
- La Process Com, très utilisée dans les entreprises, qui identifie 6 types de personnalités « de base », en vue d’adapter sa communication ;
- Le HBDI, qui met en évidence les préférences cérébrales de chacun, lesquelles influencent la façon de travailler, d’apprendre et de manager ;
- L’ennéagramme, qui s’appuie sur l’étude de 9 lignes de force.
D’autres approches plus connues du grand public s’avèrent également performantes. C’est le cas de la PNL (programmation neurolinguistique), qui privilégie le comment au pourquoi et propose une grille d’observation pour améliorer la perception de soi-même et des autres. Ou de l’AT (analyse transactionnelle), qui permet d’identifier les trois facettes de sa personnalité – Enfant, Parent, Adulte – et d’analyser les « échanges » réalisés avec son entourage.
L’auto-questionnement et les « retours » de ses pairs et/ou collaborateurs permettent de nourrir la connaissance de soi. Quand l’organisation ne s’en préoccupe pas, leur sollicitation s’avère très utile, à l’issue d’un projet ou de réunions clés. Une stratégie de mises en situations successives et de petits pas permet ensuite de faire évoluer ses pratiques managériales. Sans oublier un accompagnement dédié, de quelque nature qu’il soit.
Article rédigé avec le concours de Mylène Ridel, formatrice et coach Le Chalet QVT, fondatrice de la société Label Com.
[1] Les managers de transition évoqués dans cet article sont ceux qui exercent leur métier selon la vision portée par CAHRA.
[2] Dans le cadre de formations à la gestion des émotions, Mylène Ridel demande aux participants d’identifier la zone de leur corps où se manifeste leur stress. Les participants sont stupéfaits ! Si le stress est une réaction physiologique commune à tous (boule à l’estomac, respiration qui s’accélère, etc.), chacun de nous réagit à des « stresseurs » différents. Il est capital d’apprendre à les identifier, pour pouvoir y répondre de façon adaptée.
[3] Publié sous forme de livre à part entière, Managing Oneself est extrait d’un autre ouvrage de Peter F. Drucker, Management Challenges for the 21st Century.