Management de transition : faire alliance pour construire la relation de confiance – 2/2
Une fois initiée sur les meilleures bases la relation entre manager de transition et donneur d’ordres, il reste à construire un lien de confiance seul à même de permettre la transformation. Pour y parvenir, il faudra évaluer la résistance au changement, surmonter les peurs, et faire prendre conscience au donneur d’ordre de son propre rôle dans la situation. Il restera alors à s’assurer de l’envie partagée de s’engager dans la transformation.
Evaluer les peurs et le niveau de résistance au changement
Pour amener l’interlocuteur à percevoir son rôle dans les difficultés traversées par l’organisation, il faut d’abord évaluer le niveau de résistance auquel il se situe. On en recense 4 :
- Le 1er niveau de résistance s’exprime ainsi : « Je ne connais pas d’autres options que celle dans laquelle je suis. »
- Le niveau 2 est : « Je sais qu’il existe d’autres options, mais je ne sais pas quoi changer. »
- Au 3e niveau, l’individu se dit : « Je sais que j’ai d’autres options, je sais ce que je dois changer, mais je ne sais pas comment m’y prendre. »
- Au dernier niveau (qui n’est pas le plus simple à lever quand il est conscient), la personne sait qu’il y a d’autres options, sait quoi changer, sait comment changer, mais je n’en a pas envie ». Elle souhaite protéger son cadre de référence, le plus souvent,
Le travail d’alliance va consister, dans un premier temps, à éveiller l’interlocuteur à ces différents stades de son état personnel par rapport au changement. Il devra pour cela parvenir à surmonter ses peurs, qui risquent d’être d’autant plus importantes que le niveau de résistance au changement est élevé.
Rappelons quelles sont les 5 peurs fondamentales : l’extinction, la mutilation, la perte d’autonomie, la séparation et la perte de l’ego. En contexte professionnel, ce sont surtout les 3 dernières qui sont pertinentes. Il est important de rassurer l’interlocuteur sur ces trois points, sur le fait qu’il sera toujours apprécié, toujours à la hauteur, que le collectif ne le rejettera pas, qu’il va garder son autonomie physique, sociale et relationnelle. Si son degré de peur est maximal sur l’un de ces points, le changement sera impossible.
Eveiller l’interlocuteur à son rôle dans le système
Une fois surmontées les peurs, il devient possible d’effectuer le nécessaire « pas de côté ». Faire le pas de côté, c’est être capable de s’observer soi-même. Pour mieux comprendre ce mouvement, on peut imaginer un exercice très simple, que CAHRA organise parfois avec ses équipes.
On positionne 3 fauteuils autour d’une table. L’individu s’installe d’abord dans le premier fauteuil, celui du « moi », et on l’interroge sur son ressenti de la situation. Il prend ensuite le fauteuil d’en face, celui d’autrui. On lui demande alors de décrire ce que ressent l’autre, comment il réagit aux paroles de « moi ». Il prend place finalement dans le 3e fauteuil, et il est invité à observer la relation, les interactions entre moi et l’autre. Que se passe-t-il dans cette relation ? Quel est le niveau de méconnaissance de la situation ? Ce troisième fauteuil matérialise le « pas de côté », qui permet de comprendre ce qui est en train de se passer dans la relation, dans le système. Bien sûr, il n’est pas possible de faire faire cet exercice au donneur d’ordres ! Mais il permet de comprendre le positionnement recherché, le mouvement qu’il faudra l’amener à faire.
Valider l’envie de s’engager dans la transformation de part et d’autre
Le processus d’alliance est essentiel dans le management de transition car il doit permettre aux parties prenantes de se positionner et de valider une volonté partagée d’agir. Cela signifie qu’il peut – même si c’est rare – ne pas aboutir : il faut savoir « ne pas y aller » quand les conditions de la confiance ne sont pas réunies.
C’est le cas, par exemple, lorsque le manager de transition et le donneur d’ordres n’arrivent pas à se mettre d’accord sur la simple matérialité des faits. Si l’on dit à son interlocuteur « que 1 + 1 = 2 » et qu’il n’est pas d’accord, autant arrêter l’entretien ! Il est sans doute en proie à une peur qu’il ne peut pas surmonter, qui l’amène à se cramponner à une version « impossible » de la réalité. Dans une telle situation, il n’est pas possible de continuer.
Autre exemple : un donneur d’ordres demande au manager de transition comment il va procéder. Le manager exprime son souhait de commencer par participer aux réunions périodiques ou de les organiser – si elles n’existent pas – avec les équipes concernées. Le donneur d’ordres refuse, au motif que « cela ne sert à rien chez nous ». Le manager de transition ne peut continuer dans ces conditions. Si, au départ, il est impossible de mettre en place les bases de la communication avec les équipes du client, il est inutile de poursuivre.
Si en revanche – et c’est le cas le plus fréquent – la phase initiale d’alliance débouche sur une relation de confiance, la transformation pourra s’amorcer dans de bonnes conditions. Le succès de la mission dépend donc, en grande partie, de cette première étape.