Manager de transition #3 : humilité et bienveillance, deux principes actifs
Le métier de manager de transition [1] ne ressemble à aucun autre ! Il engage en effet une multitude de compétences liées à des talents naturels ou des compétences sociales, émotionnelles et cognitives, développées au fil des expériences des managers. Après l’intelligence relationnelle, pierre angulaire du management de transition, et l’approche systémique, notre série explore deux autres compétences clés : l’humilité et la bienveillance.
Lors d’une mission, le manager de transition adopte une posture spécifique
Dans une organisation, l’arrivée d’une ressource externe pour répondre à une problématique n’est jamais anodine. De multiples questions, certaines craintes, naissent au sein des équipes en place. Le manager de transition doit adopter une posture qui casse immédiatement les barrières voire les a priori pouvant subsister sur ce métier. « Lorsque nous entamons une mission, notre venue modifie l’environnement dans lequel les salariés de l’entreprise évoluent, indique Pascal Lorant, manager de transition CAHRA. Nous devons donc être en mesure de faire évoluer notre posture ».
Quel que soit le niveau d’enjeu de l’intervention, le manager de transition va disrupter les pratiques managériales et organisationnelles pour opérer la transformation. Or chaque organisation génère une multiplicité d’interactions et de collaborations, entre services ou fonctions et parfois même, avec les clients. Dès lors, les leviers dont dispose le manager de transition portent avant tout sur les comportements et les méthodes. L’humilité et la bienveillance seront ses principaux « outils ».
Pourquoi l’humilité ? Parce que le manager de transition est tout sauf un donneur de leçons
Le premier objectif du manager de transition est de se faire accepter par les équipes. « Nous opérons la transformation avec les femmes et les hommes de l’entreprise, sans eux rien ne serait possible, souligne Pascal Lorant ». Si l’humilité est une qualité appréciable au niveau personnel, elle devient vitale dans une perspective de mobilisation des énergies et de mise en mouvement. « On n’arrive pas dans une entreprise avec l’idée que l’on sait tout, mais que l’on a tout à comprendre pour œuvrer là où c’est nécessaire. » Méfiance si un manager de transition prétend détenir LA solution ! « Les situations que l’on rencontre en entreprise requièrent une grande humilité. La volonté d’améliorer l’existant est notre principal fil conducteur. » Exit donc le jugement des initiatives engagées précédemment et, bien sûr, celui des personnes ; le manager de transition accompagne, co-construit, réalise avec le collectif de l’entreprise. Il réussit grâce, et avec, celui-ci.
Dérivée du latin humus – la terre -, l’humilité ancre celui qui la développe dans son humanité, les racines des deux termes étant identiques. Elle lui permet de garder les pieds sur terre et d’être conscient de ses limites, quel que soit son niveau d’expertise, ses années d’expérience, etc. « Ce qui a fonctionné dans un autre contexte, avec d’autres individus, peut se révéler inopérant cette fois. »
En faisant preuve d’humilité, le manager de transition trouve un juste équilibre entre la modestie, l’ouverture aux autres, et l’affirmation de soi – qui nourrit sa crédibilité. Il accueille les avis et les observations – pratiquant l’écoute active -, apprend des collaborateurs de l’entreprise, les remercie et leur témoigne de la reconnaissance.
Pourquoi la bienveillance ? Parce qu’elle ouvre le sésame de la relation avec les équipes
Pour réaliser une transformation efficace et pérenne, le terreau relationnel doit être favorable. Or la bienveillance est la clé d’une relation de confiance aboutie. « Le manager de transition cherche à comprendre, il souhaite aider et transmettre – une nouvelle façon d’appréhender les situations, des méthodes, etc. Lors d’une mission de transition, la bienveillance se fonde sur l’écoute : il existe des vérités et non une seule. » Les collaborateurs doivent pouvoir s’exprimer.
Si la bienveillance implique des efforts de compréhension, il s’agit aussi d’expliquer en donnant du sens aux actions. Ce faisant, le manager de transition restaure la confiance lorsque c’est nécessaire. « Et la confiance est le gage de l’engagement, rappelle Pascal Lorant. » Seul un collaborateur en confiance peut se sentir libre de s’exprimer, prendre des initiatives, oser. À l’inverse, un manque de confiance conduit à rester dans la retenue et à ne dire que ce que tout le monde sait déjà.
Dans le cadre d’une mission de transition, la bienveillance correspond également à l’accompagnement des équipes via des processus de co-construction. La pérennité de la transformation qui s’amorce en dépend. « Les collaborateurs doivent savoir que l’erreur est acceptée, considérée comme l’un des chemins de la réussite. »
Disposition d’esprit inclinant à la compréhension, à l’indulgence envers autrui selon sa définition dans le Larousse, la bienveillance appliquée au management [2] est devenue tendance. Aux antipodes d’un mode de management « bisounours », elle favorise le bien-être au travail et la performance en réduisant notamment le niveau de stress des collaborateurs. Déterminant quand on sait que la production d’hormones comme la dopamine – « l’hormone du plaisir et de la motivation » – stimule la sociabilité et le désir d’engagement [3].
Pratiquer l’humilité et la bienveillance commence par des choses simples : dire bonjour, s’adapter aux modes de communication en place, donner des feedbacks positifs, intégrer les codes informels de l’entreprise. Une démarche d’oser dire y contribue également ; l’expression de points de vue différents et le temps accordé aux échanges génèrent un cercle vertueux. À ce titre, l’humilité et la bienveillance constituent deux principes actifs du management de transition.
[1] Dans cette série d’articles, nous explorons le métier de manager de transition tel qu’il est pratiqué chez CAHRA.
[2] Un ouvrage de référence en la matière : Le management bienveillant du Dr Philippe Rodet et du DRH Yves Desjacques (éditions Eyrolles).
[3] Extrait de l’article de Parlons RH Le management bienveillant, des pratiques à fort ROI ?