Manager de transition au féminin, la quarantaine : un parcours assumé et vecteur de sens ?
On a tendance à associer le métier de manager de transition à la seconde partie de carrière et au sexe masculin. Si les profils féminins, tout comme les quadragénaires, restent effectivement minoritaires, ils sont pourtant loin d’être inexistants. Céline Capdupuy, manager de transition depuis 2021, en mission pour CAHRA, associe ces deux facettes. En tire-t-elle une force ? Cela lui donne-t-il l’opportunité d’insuffler d’autres expériences ou vécus dans sa pratique professionnelle, au bénéfice de ses clients ? Réponses dans ce portrait[1].
À quoi ressemble le manager de transition-type en 2021 ?
Si l’on en croit la principale étude consacrée au marché du management de transition[2], la France comptait seulement 23 % de femmes exerçant comme « manager de transition » en 2021 – un chiffre en baisse de trois points en un an. Quant à la moyenne d’âge de ces professionnels, elle est de 54 ans, avec une surreprésentation de la catégorie des 50-59 ans (près de six sur dix). Le secteur manquerait-il de diversité ? Pour ses premiers pas dans le monde du management de transition, Céline Capdupuy cultive ses différences et démontre que la situation peut évoluer.
À 43 ans, cette maman d’un petit garçon de cinq ans, belle-mère de deux adolescents, qui s’était installée dans le nord depuis plusieurs années, entreprend un retour aux sources – et à ses origines – dans le sud-ouest de la France. Il s’agit là d’un projet familial. Et elle se lance comme manager de transition ! Dans sa « vie d’avant », Céline Capdupuy a occupé des postes de direction opérationnelle dans l’industrie. Son chemin vers ce nouveau challenge professionnel a commencé il y a cinq ans, quand elle était directrice d’usine. Sans qu’elle considère sa jeunesse ou son genre comme un handicap.
Une « outsider » … dont la jeunesse est un atout
« J’ai toujours été « la plus jeune ». Mon premier poste, dans un grand groupe agro-alimentaire, m’a conduite quatre ans à Paris avant que mon employeur me propose une expatriation. J’avais 28 ans. En tant que femme de moins de 30 ans, j’étais l’outsider sur cette création de poste en Afrique. Le groupe m’a fait confiance lors de ce recrutement interne, face à des profils beaucoup plus seniors. » Être une femme a même constitué un atout dans cette prise de fonction. Le groupe avait en effet connaissance de la culture locale, largement matriarcale. « Par ailleurs, ma « juniorité » n’a jamais été un problème, d’autant moins qu’elle était compensée par un niveau d’énergie et de conviction très élevé. »
En Afrique, Céline Capdupuy a souhaité évoluer de l’expertise fonctionnelle au management de production. Le directeur technique lui propose alors le pilotage d’un projet en amélioration continue, pour gagner sa légitimité dans les ateliers et développer sa fibre managériale. Revenue en France, elle prend ses premières responsabilités en production, puis ronge son frein en ne se voyant pas proposer de direction d’usine ; il y avait peu d’élues femmes à l’époque dans la culture de l’entreprise. Par le biais d’un chasseur de tête, elle rencontre le DRH et le directeur industriel d’un groupe spécialisé dans l’agrochimie du végétal, qui souhaitent recruter une femme pour faire évoluer leur modèle de direction d’usine. On lui confie cette mission : elle a 35 ans. Un poste simple sur le papier, qui deviendra plus complexe quand il s’agira de gérer des programmes de CAPEX ambitieux.
Contribuer, à son niveau, à sortir des schémas traditionnels
« Pendant le processus de recrutement, le directeur d’usine que j’allais remplacer m’a posé deux questions : êtes-vous mariée ? Votre époux a-t-il aussi des ambitions de carrière ? Il ne pouvait pas imaginer que les deux membres d’un couple mènent de front leur vie familiale et professionnelle. Il estimait par ailleurs que mon parcours manquait de stabilité, parce que j’avais changé de poste en moyenne tous les quatre ans ! » Si elle comprend les résistances basées sur des schémas traditionnels, elle choisit « de ne pas dire mais de faire » – pour montrer qu’on peut obtenir des résultats via un leadership féminin naturel et assumé.
Le fait d’être exposée aussi précocement, dans sa vie professionnelle, à des enjeux stratégiques, a été un accélérateur de développement. Son employeur lui propose bientôt une fonction globale dans son domaine d’expertise, au siège ; un temps qu’elle met aussi à profit pour mûrir son projet. Car elle aspire à l’indépendance, à la possibilité d’exprimer son leadership de façon différente, en accord avec ses valeurs. L’accompagnement d’un coach contribue à sa décision, tout comme ses recherches personnelles et ses échanges avec des managers de transition. En complément de la formation dispensée par Audencia & CAHRA, Céline Capdupuy effectue actuellement un parcours HEC pour obtenir un certificat de coaching d’organisation. Elle a aussi suivi un parcours de leadership au sein de l’Ecole de Guerre.
Une première mission stimulante, à l’image du métier de manager de transition
« La perspective d’embrasser l’indépendance a nécessité une analyse de risque pour lever mes craintes en matière de sécurité financière et d’équilibre vie professionnelle – vie personnelle. J’ai également choisi de vivre mon métier dans une zone géographique « acceptable », celle de la région Nouvelle Aquitaine. C’est un pari raisonné que je fais, en concertation avec mon mari. En toute hypothèse, nous nous adapterons – comme cela a été le cas lors de mes déplacements internationaux. »
Depuis mi-décembre 2021, Céline Capdupuy mène sa première mission CAHRA : assurer le pilotage de la fonction santé-sécurité d’un groupe, dans le cadre d’une vacance de poste, et établir une feuille de route pour retrouver la confiance dans l’atteinte de résultats durables. « Grâce à cette mission initiale, je suis amenée à doser l’accompagnement opérationnel – pour ancrer des fondamentaux – et l’expérimentation, pour inviter à la transformation culturelle. L’alliance nouée avec le donneur d’ordre et les parties prenantes, du COMEX aux opérationnels, permet d’engager l’organisation sur la voie. Ma posture de manager de transition décomplexe mes interlocuteurs : ils « osent », et cherchent à valoriser ce qui est possible, pas à pas. Quand le donneur d’ordre reconnait que votre présence lui a permis de se sentir mieux, c’est la plus belle des reconnaissances ! »
In fine, qu’est-ce que cela change d’être une femme, manager de transition ?
Pour conclure, en tant qu’ex-marraine du réseau féminin de sa dernière entreprise, la jeune manager de transition partage quelques conseils : « Réfléchissez à vos propres barrières, rentrez dans un processus de projection personnelle pour poser la situation et les enjeux, discerner ce qui relève d’un risque ou d’un bénéfice. Il n’existe pas de recette clé en main. Alors, écoutez votre cœur, votre corps, pas uniquement votre cerveau ! Œuvrez à bien vous connaître vous-même et faites-vous confiance pour effectuer ce choix de carrière. Si un aléa se présentait, vous serez toujours en capacité de rebondir à nouveau, tout en tirant parti de ce que vous avez appris. »
[1] Découvrez un autre parcours singulier sur notre blog : celui de Régis Gouraud, ancien prêtre devenu directeur Grand Ouest chez CAHRA.
[2] Il s’agit du baromètre de France Transition.
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