Questions de transition : j’ai un problème d’organisation et de turn-over, que faire ?
Telle est la demande du donneur d’ordres lorsqu’il nous contacte pour mener une mission de management de transition dans son entreprise. Vous connaissez tous la chanson je suppose ? Tout va très bien, Madame la marquise, Tout va très bien, tout va très bien – Pourtant il faut, il faut que l’on vous dise, On déplore un tout petit rien… En l’occurrence, les « petits riens » que je vais découvrir sur le terrain vont révéler des questions de transition plus complexes, dans leur dimension managériale notamment.
René Gicquel, manager de transition CAHRA
#organisation, #turn-over et #perte de savoir-faire : les questions de transitions sur lesquelles je suis missionné
Des problèmes d’efficacité conduisent le donneur d’ordres à faire appel à un manager de transition CAHRA. Voilà ce qu’il m’expose : « Le taux de turn-over est important dans mon entreprise et entraîne une perte de savoir-faire. En intervenant sur l’organisation, moyennant éventuellement quelques recrutements et un accompagnement des équipes, tout devrait être résolu en six mois ».
Dont acte. J’entame la mission et interviewe les managers et les équipes pour recueillir leur sentiment. J’analyse les données recueillies et présente mon diagnostic. La situation est plus grave que celle perçue par le donneur d’ordre : la maison brûle, pour employer une image significative !
Les « fondamentaux » de l’organisation opérationnelle sont partis en fumée. Jugez plutôt :
- il n’y a plus de réunion de production – dans une usine de plus de 500 personnes ;
- la maintenance préventive, le suivi et l’analyse des rebuts ont tout simplement disparu.
Résultat : les équipes sont désalignées, la maintenance ne parle plus à la production etc. La logistique effectue des dépenses exorbitantes pour livrer les clients et pallier aux dysfonctionnements du service approvisionnements des frais de transport exorbitant en six mois !
Pour éteindre « l’incendie » qui gagne toute l’usine : je décrète l’état d’urgence managériale
Mon objectif est double :
- agir sur les foyers les plus actifs via un plan d’action immédiatement opérationnel ;
- embarquer dans mon camion de pompier les managers et les équipes.
In fine, ceux-ci devront être capables d’éteindre tout type de feu grâce aux outils et méthodes managériales mises en œuvre lors de la mission de transition.
J’utilise tout d’abord une arme redoutable et ultra perfectionnée pour occuper le terrain : mes yeux et mes jambes, alliés à une bonne dose de BSP – « bon sens paysan ». Je m’engage dans une écoute active [1] des collaborateurs, décisive afin de bien cerner les problèmes. Je perçois leur souffrance, une sympathie réciproque naît, activant l’empathie. Très souvent, les équipes suggèrent elles-mêmes la clé de résolution des problèmes.
Dans une optique d’amélioration continue de la qualité, il est important de balayer, service par service et à fréquence hebdomadaire, l’avancement de nos PDCA (Plan – Do – Check – Act). La progression est rapide et nous célébrons systématiquement nos Quick Win.
Pour accentuer cette progression et l’ancrer, j’utilise un extincteur ultra puissant, le yokoten, terme japonais signifiant « déploiement horizontal ». Il s’agit de standardiser le partage des bonnes pratiques et des apprentissages, ce qui favorise la dynamique de groupe.
Neuf mois plus tard, le feu est maîtrisé et les relations transversales, facilitées ; il n’y a plus de frais exceptionnels de livraison. Au-delà du résultat financier, l’ensemble des ressources de l’usine et moi-même avons « remis l’église au milieu du village ». À titre personnel, je viens de vivre une formidable aventure, humaine et professionnelle.
Pour aller plus loin : mon appréciation des questions de transition récurrentes
Dans 95 % des cas, la perception du donneur d’ordres ne reflète qu’une partie de la réalité du terrain. Dans notre exemple, le problème de turn-over identifié par celui-ci résulte d’une désorganisation complète de l’usine, dont il en est en partie responsable. Malgré une expertise technique exceptionnelle et son intelligence rare, ce donneur d’ordres n’est pas à l’aise avec le management.
Non seulement, grâce au dialogue que nous avons engagé et à l’alliance réalisée avec lui [2], il a pleinement endossé sa part de responsabilité, mais il m’a confié « les clés du camion » pour réorganiser l’entreprise. S’il m’a accordé sa confiance, c’est qu’il savait que je n’étais pas là pour le juger, mais pour l’aider.
[1] L’écoute active repose sur plusieurs piliers : une écoute globale (du langage verbal mais aussi para-verbal et non-verbal), l’écoute de soi-même, la disponibilité, la capacité à distinguer ce qui est exprimé (les faits) et la façon dont cela l’est (vivacité, colère). Selon, l’écoute sélective sera activée (on n’entend que ce qui nous intéresse), l’écoute engageant la curiosité, celle engageant l’empathie et enfin, celle où la présence est maximale.
Cette écoute active permet d’optimiser le « résultat » de l’échange, de désamorcer les crises et de développer l’intelligence collective.
[2] L’alliance est l’une des étapes clés de la méthodologie CAHRA lorsqu’une mission de transition est conduite dans une entreprise.