Secteur agroalimentaire : teneur en richesse humaine garantie
Quel que soit le niveau auquel ils évoluent, les professionnels de l’agroalimentaire se sentent généralement très engagés, très attachés au produit qu’ils fabriquent. Cela n’a au fond rien d’étonnant, car un produit que l’on mange touche à des enjeux très différents, de la gourmandise à la sécurité sanitaire. Avec Jean-Louis Picquette et Gwenaël Josseaume, managers de transition CAHRA, petit aperçu d’un univers où les missions sont riches et diverses, à l’image de l’offre des industriels de l’agroalimentaire français. À l’image également de la diversité des problématiques traitées quotidiennement par CAHRA.
Parler le bon langage
Selon Jean-Louis Picquette, adopter rapidement les codes de l’agroalimentaire passe par une bonne connaissance pratique de la « langue » en vigueur dans cet univers. Dès que l’on y parle de certifications, de qualité et de productivité, certains acronymes sont en effet incontournables.
A titre d’exemple, l’IFS (International Food Standard) correspond à la certification ISO 9000, mais appliquée aux spécificités à l’agroalimentaire. Le BRC (British Retail Consortium) désigne le même type de certification, mais destinée aux anglo-saxons. Un CCP (Critical Control Point) est une certification concernant un point de contrôle discriminant sur une ligne de production agroalimentaire.
La première clé de succès du manager de transition est de connaitre et d’intégrer ces codes en amont de sa mission, afin de pouvoir entrer en communication immédiatement avec les équipes, et d’être pertinent dès le début de la mission.
De son côté, Gwenaël Josseaume relève une tendance des professionnels de l’agroalimentaire à penser qu’une personne extérieure à l’entreprise et à son métier mettra très longtemps à s’adapter. Il souligne que des univers comme la boucherie ou la pâtisserie industrielles ne sont pas si éloignés l’un de l’autre qu’on voudrait le croire. De plus, sur le terrain, les techniques de questionnement et d’écoute adoptées par les managers de transition de CAHRA leur permettent d’appréhender rapidement une organisation et ses problématiques.
Les plus hauts sommets de l’hygiène
Le succès d’une mission dans l’agroalimentaire tient largement aux expériences du manager pour tout ce qui concerne les produits, mais également les process en vigueur dans cet univers.
Si les missions des managers de transition peuvent être très diverses dans le secteur agroalimentaire, nombre d’entre elles consistent à mettre sous contrôle et transformer les organisations. Les dirigeants redoutent particulièrement, quand l’environnement n’est pas stable, que l’absence du directeur ou d’un membre de la direction ne pose de sérieux problèmes.
L’une des missions mémorables de Jean-Louis Piquette a fait de lui un producteur de micro-organismes, bactéries et moisissures destinés à la fabrication de croûtes de fromage au lait cru et de peaux de saucisson. Ces bactéries visent à protéger les produits tout en leur donnant du goût.
Particularité de cette mission d’un an dans un métier relevant à 50 % de l’agroalimentaire et à 50 % de la chimie organique : la matière première était d’un coût très réduit, puisqu’il s’agissait uniquement de sucre et de nutriments dans laquelle était injectée une souche de bactérie, alors qu’elle représente généralement dans ce secteur le poste majeur dans le prix de revient.
Autre spécificité, le très haut niveau des process de sécurité pour préserver les conditions de développement des bactéries, sous peine de voir la culture mourir. Sans atteindre les mêmes sommets de précaution, les process d’hygiène sont plus exigeants dans l’agroalimentaire que dans tout autre secteur industriel (assez proche du médical et du pharmaceutique). Entrer dans un atelier sans respecter les bonnes pratiques – nettoyage, passage dans un sas, etc. – peut en effet compromettre toute une journée de production.
La fusion des cultures au menu
Chargé de fusionner deux usines de produits frais dans une logique de rationalisation économique, Gwenaël Josseaume a dû relever le challenge consistant à faire travailler ensemble des équipes qui se considéraient jusqu’alors comme adversaires, bien qu’appartenant à la même enseigne et fabriquant des produits voisins. L’objectif était de parvenir, in fine, à disposer d’un directeur d’usine entouré de ses équipes, c’est-à-dire d’un seul responsable qualité, d’un seul responsable maintenance, etc.
La méthode pédagogique a été d’expliquer aux services et personnes concernées que les critères de décision seraient transparents et factuels. Des mises en situation innovantes ont permis à des personnes, pourtant en compétition pour un poste, de se connaitre, de se comprendre et même de s’apprécier.
Remporter l’adhésion à un schéma où certains sont promus et d’autres pas est un vrai défi pour tout manager. La mission a nécessité de travailler sur les comportements pour que les personnes non retenues pour un poste, par exemple celui de responsable qualité, disposent d’espaces de liberté et ne se sentent pas exagérément frustrées par rapport au confrère plus heureux ; pour qu’elles comprennent, aussi, qu’une évolution ultérieure reste envisageable, et qu’il est possible de mettre en place un programme leur permettant de progresser vers le poste souhaité, par exemple dans une autre usine.
Conditions de travail et sécurité
La sécurité des collaborateurs est d’autant plus essentielle dans l’agroalimentaire que les conditions de travail s’y avèrent souvent difficiles. S’il y a de moins en moins de port de charges lourdes, le travail est souvent répétitif, en horaires décalés, ou à températures extrêmes (froid), et peut donc mettre les organismes à rude épreuve. Les conventions collectives du secteur sont ainsi très précises sur les équipements, les protections, le nombre de pauses, etc. Par ailleurs, une ligne de production ne s’arrête pas : un employé qui prend une pause est systématiquement remplacé durant celle-ci.
Dans ce contexte, être à l’aise sur le terrain constitue un fort atout de réussite dans le monde agroalimentaire : le manager doit être présent dans les ateliers, sur les lignes de production, pour s’assurer que les collaborateurs travaillent dans les conditions appropriées. Il en va de la sécurité des salariés comme de celle du produit.
La richesse des relations humaines caractérise le secteur agroalimentaire. La diversité s’y décline sous toutes ses facettes avec une réelle parité (les collaboratrices étant parfois plus nombreuses que les collaborateurs) et de nombreux salariés arrivés récemment en France, tandis que d’autres sont issus de familles enracinées localement qui travaillent sur le site de génération en génération. Pour fédérer de telles équipes, le respect du produit et la passion de celui-ci sont décisifs : l’engagement, la fierté qu’il suscite, sont le socle d’une culture commune. Autant de valeurs dans lesquelles CAHRA se retrouve pleinement, d’où le nombre élevé de missions menées par le cabinet de management de transition dans ce secteur – 200 depuis sa création en octobre 2009.